La bicyclette sert aussi à se rendre au travail ou à faire les courses. Pour la première fois, ces pratiques dites «utilitaires» sont étudiées en Suisse. Un ouvrage truffé de chiffres et d’informations originales en rend compte.
Selon que l’on soit piéton, assis sur une selle ou posé dans une voiture, les avis sur le vélo varient beaucoup. Ils possèdent toutefois une caractéristique commune: la subjectivité. L’étude conduite par Patrick Rérat (professeur à l’Institut de géographie et durabilité), Gianluigi Giacomel et Antonio Martin tombe à pic pour remettre un peu d’ordre dans le débat.
L’ouvrage débute avec un rappel historique, suivi d’un panorama global enrichi de statistiques helvétiques et européennes. Certaines données confirment des intuitions: la Suisse alémanique est bien plus cyclophile que la Suisse romande ou le Tessin. À Bâle, 17,6% de tous les déplacements se font à bicyclette, contre 1,6% à Lausanne (la moyenne nationale est proche de 7%). Les choses pourraient changer, car les chercheurs constatent l’augmentation récente (mais timide) de la pratique du vélo en ville. Dans notre pays de pendulaires, 60% des déplacements – quels que soient les motifs – sont inférieurs à 5 km, ce qui montre le potentiel de développement de la bicyclette.
Une grande partie du livre décortique les résultats d’un questionnaire rempli par 14000 participants à l’édition 2016 de Bike to work, qui se déroule en mai et juin. Il s’agit d’une manifestation annuelle de promotion de l’activité physique dans les entreprises suisses. De plus, dans une optique qualitative, 30 participants de l’Université de Lausanne ont joué le jeu de l’entretien. L’assiduité des répondants étonne. Ainsi, «en moyenne, un participant à Bike to work passe 47,8 minutes par jour sur son vélo si ce dernier est mécanique et 53,2 minutes s’il bénéficie d’une assistance électrique». Ces valeurs élevées doivent être nuancées car l’action engendre un effet de compétition entre les équipes qui y prennent part. L’étude livre une avalanche de données sur les compétences des cyclistes (suis-je capable de réparer mon vélo? Suis-je à l’aise quand je traverse un giratoire?).
Pourquoi les gens roulent-ils à vélo pour se rendre au boulot? En premier lieu, pour faire de l’exercice, pour le bien-être physique et psychique. Les idées de flexibilité et de plaisir lié au paysage traversé viennent ensuite. 88% des sondés mentionnent le respect de l’environnement. Parmi les obstacles à cette pratique figure en premier la météo, devant les risques d’accidents (34% des répondants vaudois ne se sentent pas ou peu en sécurité sur le trajet de la maison au travail, le taux le plus élevé de Suisse). L’ouvrage pointe d’ailleurs du doigt le manque d’infrastructures destinées aux cyclistes.