Nuno Pereira

Anti-impérialisme et nouvelle gauche radicale dans la Suisse des années 68

Titulaire d’une licence en histoire de l’Université de Genève, Nuno Pereira a été assistant aux universités de Genève et de Lausanne. En janvier 2015, il a soutenu à l’Institut d’études politiques, historiques et internationales de l’UNIL sa thèse de doctorat sous la direction du Prof. Jean Batou. Il poursuit ses recherches dans ce même institut comme chercheur sénior dans le cadre d’un projet FNS consacré aux conséquences biographiques de l’engagement politique.

Cette thèse entend apporter un éclairage sur l’histoire politique et sociale de la Suisse des années 68, en étudiant l’articulation entre les mouvements anti-impérialistes et la nouvelle gauche radicale, alors foisonnante. Il s’agit d’analyser cette période de contestation au prisme de l’anti-impérialisme révolutionnaire, lequel, dans le contexte de l’opposition à la guerre du Vietnam, a fortement imprégné le mouvement protestataire en assignant notamment au tiers-monde le rôle de sujet de l’émancipation mondiale.

Combinant une triple approche – chronologique, thématique et biographique – ce travail est structuré en quatre parties. La première esquisse un panorama des mouvements anti-impérialistes des années 1960 et 1970 en Suisse, avec une focalisation sur les « années anti-imp », entre 1968 et 1975. La deuxième interroge le rapport entre anti-impérialisme et nouvelle gauche radicale, en proposant une typologie des principaux courants. La troisième partie s’attache à examiner le système de représentations du monde et de la Suisse véhiculé par le discours de l’extrême gauche. Enfin, prenant pour objet le militantisme, la dernière partie esquisse un portrait de groupe de la « génération anti-imp », fondé sur une enquête prosopographique et sur un corpus d’entretiens réalisés avec des militants de l’époque.

L’étude révèle que l’anti-impérialisme a fourni à la contestation soixante-huitarde un cadre conceptuel et analytique, un facteur de structuration, et qu’il a été un vecteur de mobilisation. Il a en particulier permis à la gauche radicale suisse d’inscrire sa lutte anticapitaliste locale dans un horizon global d’émancipation. L’analyse de l’anti-impérialisme révolutionnaire, qui a connu son apogée dans les années 68 avant de connaître un déclin rapide et presque total, invite à appréhender cette « décennie mouvementée » comme la fin d’un long cycle politique.