Votre navigateur est obsolète. Veuillez le mettre à jour avec la dernière version ou passer à un autre navigateur comme ChromeSafariFirefox ou Edge pour éviter les failles de sécurité et garantir les meilleures performances possibles.

Passer au contenu principal

Revue «Etudes de lettres»En 1980, le monde basculait dans une autre histoire

En 1980, Marguerite Yourcenar est la première femme élue à l’Académie française.

C’était il y a quarante ans: 1980 inaugurait une décennie qui a vu gonfler la vague néolibérale puis s’effondrer le mur de Berlin, se propager le VIH, qui a connu diverses catastrophes environnementales comme Tchernobyl, mais aussi l’essor de l’ordinateur personnel, du compact disc, du téléphone mobile et des jeux vidéo.

1980 désigne aussi une année: celle du boycott des Jeux olympiques de Moscou par 50 nations, du début de la guerre Iran-Irak, de la mort de Jean-Paul Sartre ou de l’assassinat de John Lennon. Sur les écrans passent «La Boum» ou «L’empire contre-attaque», aux oreilles résonnent les «Hells Bells» d’AC/DC ou le funk de Diana Ross avec «Upside Down». En France, Eddy Mitchell fredonne «Couleur menthe à l’eau», Renaud popularise le verlan, Trust martèle «Antisocial».

«L’an zéro du monde contemporain»

1980 marque également la date retenue par les historiens de la littérature comme celle de «l’an zéro du monde contemporain». «On observe notamment un retour au récit, à l’histoire, à la mémoire, à la littérature qui dit quelque chose du réel et qui n’est pas simplement une technique expérimentale, comme a pu l’être le nouveau roman», relève Jérôme Meizoz, qui a dirigé avec Gilles Philippe un numéro spécial de la revue universitaire «Études de lettres» consacré à 1980.

«Nous proposons des instantanés, et c’est au lecteur d’essayer, s’il le souhaite, de relier les fils»

Jérôme Meizoz, Faculté des lettres de l’Université de Lausanne

Ce glissement ne s’opère évidemment pas en un an, mais les deux professeurs de l’Université de Lausanne ont choisi d’utiliser ce qu’ils nomment prudemment un «possible seuil» comme outil pour repérer des changements dans le monde culturel, mais aussi dans la société. Car c’est à cette date que les sociologues font naître les premiers représentants de la génération Y, les enfants de la postmodernité qui dictent aujourd’hui la norme esthétique et idéologique.

Un portrait chinois

La cinquantaine de courts textes de chercheurs tous issus de la Faculté des lettres proposent ainsi une vision en mosaïque, aux thématiques à la fois variées et traitées avec une grande précision. Ce portrait chinois de 1980 naît d’articles érudits et d’autres plus grand public, naviguant de la France aux États-Unis en passant par la Roumanie, l’Inde ou la Suisse romande.

On y lit par exemple que L’Age d’Homme a publié un recueil de poésies de l’auteur polonais Czeslaw Milosz deux semaines avant qu’il reçoive le Nobel de littérature, le destin hors norme de Romain Gary, alias Emile Ajar, l’entrée de l’ultracontemporain, mais aussi de l’architecture, à la Biennale de Venise, la naissance du cyberpunk, ou comment un défilé d’Yves Saint-Laurent consacré aux écrivains a contribué à de nouveaux déploiements de la poésie dans l’espace public.

Un histoire «à trous»

Jérôme Meizoz prévient toutefois: «Il y a forcément des trous. Par ailleurs, chaque domaine a une histoire qui évolue à une vitesse différente. Les regarder sur une seule année peut donner une image un peu faussée. Il faut plutôt y voir un entrelacement de changements. Nous proposons des instantanés, et c’est au lecteur d’essayer, s’il le souhaite, de relier les fils.»

«1980, an zéro du monde contemporain?»
Dirigé par Jérôme Meizoz et Gilles Philippe
Revue Etudes de lettres no 312, 250 p.