Le Dr Yusuke Takeuchi, pédiatre spécialisé dans la santé des adolescents, enseignant et doctorant en pédagogie médicale, a été nommé responsable de l’Unité de pédagogie médicale (UPMed) de l’École de médecine dès le 1er septembre 2023. Interview.
Candidat à l’interne, le Dr Yusuke Takeuchi a été choisi au terme d’un processus de recrutement rigoureux. La pédagogie médicale a toujours fait partie des intérêts du médecin qui y a consacré son travail de master, puis son doctorat MD. Il a aujourd’hui cessé sa pratique clinique pour reprendre les rênes de l’UPMed et débuter en parallèle un PhD en éducation médicale à l’Unité de développement et de recherche en éducation médicale (UDREM) de l’Université de Genève. Marc Sohrmann, actuel vice-directeur opérationnel de l’École de médecine et ancien responsable de l’UPMed, se réjouit de cette nomination : « Son expérience de terrain, à la fois comme clinicien et comme enseignant, son approche pragmatique de la pédagogie ainsi que l’importance qu’il attribue au travail collaboratif, font partie de ses atouts clés pour ce poste ». Yusuke Takeuchi répond à nos questions.
Quelles sont vos priorités en tant que nouveau responsable de l’Unité de pédagogie médicale ?
Je n’ai pas l’intention de réinventer la roue, mais plutôt de potentialiser tout ce qui a été fait jusque-là et de poursuivre dans cette voie. Ces dernières années, les activités de l’Unité de pédagogie médicale ont évolué de manière significative. L’Unité s’est par exemple fortement impliquée dans des activités transversales au sein de l’École de médecine, comme les processus qualité ou l’amélioration du cursus. Ces activités ont rejoint celles plus historiques de soutien pédagogique aux enseignants. J’aurai à cœur ces prochains mois de mettre à contribution toute l’équipe pour redéfinir nos missions à la lumière de cette évolution ; il s’agira d’un travail collaboratif afin que toutes et tous partagent une vision commune à laquelle chacune et chacun puisse adhérer.
Peut-on s’attendre à un virage dans les missions de l’UPMed auprès des enseignant·e·s ?
Un virage dans la continuité, oui. Nous allons bien entendu mener une réflexion sur l’offre de formations pédagogiques existante pour nous assurer qu’elle corresponde à l’évolution des besoins des enseignant·e·s. En parallèle, nous souhaitons développer, en étroite collaboration avec les autres unités, une culture d’innovation et de recherche appliquée en pédagogie médicale au sein de l’École de médecine. Nous avons un très grand nombre d’enseignant·e·s dont certain·e·s sont très impliqué·e·s dans les réflexions concernant la formation. Parmi elles et eux, certain·e·s ont développé des innovations dans le cadre de leur cours, tandis que d’autres ont rencontré des difficultés. C’est une grande richesse ! Et je trouverais extrêmement intéressant de réfléchir à la meilleure façon de créer une communauté de pratique avec ces enseignant·e·s, avec des opportunités permettant de favoriser le partage d’expériences du terrain en y intégrant l’évidence scientifique en pédagogie médicale. Dans cette vision, je considère l’UPMed non pas comme détentrice unique du savoir en pédagogie médicale, mais comme un catalyseur, une force rassembleuse dont le rôle est de stimuler l’échange et la co-construction pour faire évoluer l’enseignement.
Comment améliorer l’enseignement ?
Un certain nombre d’améliorations ont vu le jour ces dernières années et je m’en réjouis. Il s’agit maintenant de poursuivre nos efforts dans cette voie. Le nouveau référentiel national PROFILES met l’accent sur le développement des compétences et nous oblige à revoir la façon dont envisageons l’enseignement. C’est stimulant !
L’enseignement dans le milieu clinique est un axe qui me tient particulièrement à cœur d’améliorer, car c’est un environnement d’apprentissage plus hétérogène, moins structuré. De mon point de vue, il est nécessaire d’adopter une vision systémique et d’agir à différents niveaux. Au premier plan, comme dans toute démarche d’amélioration de l’apprentissage, les étudiant·e·s doivent être au centre. Nous avons par exemple exploré l’accompagnement par coaching lors de deux projets pilotes pendant l’année de stages (MMed3). Mais des réflexions conjointes sont tout autant nécessaires avec les services et les clinicien·ne·s qui accueillent les étudiant·e·s : comment peut-on améliorer l’intégration de l’enseignement dans l’organisation d’un service dont la fonction première est l’accueil de patient·e·s ? Comment y favoriser une culture propice à l’apprentissage ? Comment peut-on valoriser cet enseignement dans son temps de travail et sa carrière ? Ce sont des questions qui me paraissent également importantes.
Quels sont les enjeux de la formation des médecins de demain ?
On ne pratiquera plus la médecine dans 10 ans comme on la pratique aujourd’hui. Non seulement les connaissances évoluent très rapidement, mais le visage de la profession change également très vite, tout comme les besoins des patient·e·s et de la société. Certains développements technologiques, comme l’intelligence artificielle générative, auront un impact significatif sur l’activité de médecin. Dès lors, notre cursus de formation médicale ne doit surtout pas se limiter à l’acquisition d’une grande masse de connaissances. Il doit absolument contribuer au développement de compétences telles que la pratique réflexive, l’esprit critique ou encore l’apprentissage auto-dirigé. Ceci afin que les futurs professionnel·le·s soient capables de répondre de manière flexible aux différents défis qui les attendent et aux besoins d’une société en rapide évolution, et ce, tout en restant attentifs à leurs propres besoins. Ces enjeux nous incitent également à nous préoccuper du développement de l’identité professionnelle chez les futur·e·s médecins.
Qu’est-ce qui vous motive dans ce poste de responsable de l’Unité de pédagogie médicale ?
Contribuer à la formation des professionnel·le·s de demain en travaillant pour et avec les étudiant·e·s est très motivant et donne énormément de sens à mon travail ; suffisamment pour que je fasse le choix de m’y dédier totalement en cessant ma propre pratique clinique et en me lançant dans un PhD dans ce domaine. La raison complémentaire à cette motivation, c’est que l’Unité de pédagogie médicale est une magnifique équipe, que je connais déjà depuis de nombreuses années ; on peut compter les un·e·s sur les autres dans un esprit collaboratif. Je m’y sens bien et c’est primordial pour moi.