Mathieu Triclot est maître de conférences en philosophie à l’université de technologie de Belfort-Montbéliard. Ses recherches portent sur la cybernétique, l’histoire de l’informatique et la notion d’information.
Keynote : Comprendre le jeu par le geste : essais de rythmanalyse
Vendredi 6 octobre 2017, 18h30, Amphimax 414
Peut-on étudier les jeux vidéo par les gestes des joueurs ? Que peut-on comprendre des jeux, en faisant temporairement l’économie de l’image, pour se focaliser sur la part motrice et rythmique de l’expérience ? Cette communication présentera les résultats d’un programme de recherche fondé sur un large corpus d’enregistrements des entrées sur les contrôleurs produites lors de sessions de jeux. La fonction première de cette étude consiste à faire apparaître une strate esthétique et sensorielle de l’expérience vidéoludique liée à l’engagement du corps jouant, à l’habileté manuelle, aux rapports de vitesse et aux affects qui les accompagnent.
Cette recherche s’inscrit dans une tradition ancienne en sciences sociales d’analyse des rythmes (Bachelard, Mauss, Leroi-Gourhan, Barthes, Lefebvre, Meschonnic, Schmitt…). Elle permet d’obtenir des résultats à plusieurs niveaux : (1) pour la classification des jeux en fonction de leurs exigences motrices, (2) pour l’étude de sous-corpus spécialisés, comme les genres ou les séries de jeux, sur lesquelles des différences significatives peuvent être découvertes, (3) pour la comparaison entre les joueurs et l’analyse des dynamiques d’apprentissage, (4) pour l’étude esthétique des variations rythmiques au sein de jeux ou de sessions particulières. L’analyse de ces données ouvre vers un ensemble de questions théoriques quant au statut esthétique des jeux, entre art de l’image et performance (Goodman), à la relation entre la manette et l’instrument de musique (Sudnow, Sève) ou plus généralement l’objectivation de la part infra-langagière de l’expérience ludique (Bellour).
Professeur titulaire de l’Université de Montréal, Bernard Perron est un spécialiste du jeu vidéo d’horreur.
Keynote : Le Survival Horror: Marquer la culture vidéoludique avec un écran de chargement
Samedi 7 octobre 2017, 11h, Amphimax 414
Le Survival Horror est certainement l’un des genres vidéoludiques les plus connus. Composé de jeux d’action et d’aventure, il est identifié par: ses récits exploitant des thèmes d’épouvante connus ; son traitement de tous les tropes de l’horreur, son utilisation cinématographique d’angles de caméra prédéfinis ; son exploitation du son afin de permettre la détection des menaces (soupçonné ou anticipé) ; la vulnérabilité du personnage-joueur qui doit faire face à ou fuir des ennemis monstrueux tout en trouvant la sortie d’espaces labyrinthiques et claustrophobes ; et ses contrôles maladroits qui rendent la vie du joueur encore plus difficile. Les conventions de Survival Horror sont si bien établies que les critiques et les commentateurs du genre ont depuis quelques années annoncé sa mort ou son extinction étant donné l’évolution de sa jouabiltié plus axée sur l’action. Mais il ne faut pas oublier que le Survival Horror est avant tout une étiquette.
Cette conférence souhaitera en conséquence examiner dans le détail comment cette appellation a été à l’origine utilisée par Capcom pour désigner Resident Evil (1996), comment elle a été initialement reçue et comment elle a lentement été utilisée pour nommer et définir un corpus spécifique de jeux vidéo d’horreur (y compris Alone in the Dark, Dino Crisis, Silent Hill et Forbidden Siren). Pour ce faire, nous examinerons les jaquettes de jeux, les publicités, les critiques des premiers Resident Evil et des autres jeux (dans PlayStation Magazine, GamePro, Hyper, etc.), ainsi que divers comptes rendus historiques du genre par des journalistes et des chercheurs en études du jeu vidéo.