A 67 ans, je ne me sentais pas encore vieille. Quelques activités bénévoles étaient venues atténuer le choc de la retraite et colorer mes journées. C’était avant le Covid-19, avant les contraintes, l’anxiété distillée par les bulletins d’informations. Avant la privation de liberté au nom de la protection des plus vulnérables, ont-ils tous dit.
Avec du recul, j’ai plutôt bien vécu ce repli imposé et mesuré ma chance: un lieu de vie agréable, la forêt à proximité, des livres à profusion, pas de télétravail, pas d’obligation de me transformer en enseignante… Durant les premières semaines, alors qu’aucun masque n’était disponible, il m’en restait une boîte datant de la grippe H1N1, c’est dire que je me sentais privilégiée. Dès lors, j’ai continué à faire mes courses alimentaires dûment équipée!
Mais lorsqu’il a été question de confiner les seniors plus longtemps, je me suis aussitôt sentie en désobéissance civile. Là, je ne les suivrais pas… Je ne devais pas être la seule, car ils sont rapidement revenus sur leur décision.
J’ai l’air d’en vouloir à nos autorités, ce n’est pas le cas. Je pense plutôt que le Conseil fédéral a bien géré cette crise jusqu’au moment où l’économie a passé en force, mais c’est une autre histoire.
Ce qui m’a agacée, puis énervée au plus point, c’est cette expression, des milliers de fois répétée: «nos aînés». En Suisse, comme en France. Plus les jours passaient, moins je supportais le ton paternaliste. Aucun procès d’intention, c’est juste que je ne m’y retrouve pas dans cette appropriation!
Je rends toutefois à César ce qui lui appartient: ce fichu virus et ses conséquences m’ont permis de tourner définitivement la page des activités qu’on se doit de faire ou d’avoir et d’entrer plus sereinement dans ce que je dois bien appeler l’inconnu.
Eliane F., bénévole à Connaissance 3