Flash-éco 04, du 26 avril 2020
Les signes ne mentaient pas avant la crise de 2008, ils ne mentent pas non plus dans la récession 2020. Quels sont-ils?
Crise de 2008
A- Spéculation massive à la hausse: acquisition de millions de maisons individuelles (100% de crédit, taux zéro) lancée par le président américain. Au lieu de doubler, le prix des maisons a chuté, les banques ont mis à la porte les débiteurs défaillants (42 millions d’américains de toutes professions).
B- Spéculation massive sur la protection (hedging) des valeurs boursières: mondiale et déréglementée, elle devient un but en soi.
La finance se libère de l’économie, multiplie à l’infini ses opérations, vampirise les valeurs économiques. Dans l’heure où la bulle spéculative a crevé, les liquidités irriguant l’organisme économique ont disparu; avec elles, la confiance. Sans l’interventionnisme immédiat de l’Etat américain, le système économique libéral serait tombé en cessation de paiements.
C- Spéculation massive à la baisse:
– Ventes à terme généralisées (vente en avril pour Fr. 100 d’un objet qu’on ne possède pas, livrable en décembre, qu’on pense acheter pour Fr. 50 d’ici à fin novembre).
– Ventes à terme de la dette de pays en difficulté (Grèce): on spécule que leur prix va baisser, on décrédibilise la dette et le pays, on fait baisser la valeur de ses emprunts et grimper en flèche le taux débiteur.
La crise éclate avec l’assèchement brutal des liquidités financières. Les banques créancières de la Grèce risquent le dépôt de bilan (les banques françaises dans l’immédiat, les allemandes plus tard).
Sans l’intervention des banques centrales américaine et européenne et des Etats, le système bancaire se serait effondré.
La finance mondialisée et déréglementée, découplée de ses objectifs économiques (à long terme et de société) se consacre à ses buts égoïstes (à court terme, spéculatifs), confinant l’économie (la gestion de la maison, de la société) dans une croissance rachitique.
Crise de 2020
Quand éclate la crise du Covid-19, la confiance — carburant du système libéral — n’est toujours pas restaurée: l’économie occidentale entame sa treizième année dans la molle inconscience de la mort cérébrale et de l’alimentation artificielle (facilitation quantitative illimitée des banques centrales). Le fait que cette fois-ci les causes sont exogènes à l’économie n’exonère pas les économistes de leur responsabilité éthique (contrairement à ce que prétend la doctrine):
A- Le coma artificiel de l’économie depuis 2008 est le signe d’une maladie chronique: «on a appris à vivre avec et non à bien la vivre» (voir facteurs de récession, Flash-éco 03),
B- Les tensions entre unilatéralisme chinois et ré-actionnisme américain, exacerbées par la crise sanitaire et la récession économique 2020 s’ajoutent aux signes révélateurs du début de la fin de la coopération dans les échanges mondiaux.
Les signes ne mentent pas. Les hommes oui.
Dernière minute
Les tractations de l’UE pourraient aboutir à une politique économique différente à double détente: la sortie de la récession 2020; le soutien à la transition écologique.
Jean-Marie Brandt, dr ès sciences économique et en théologie