Deserts

Sculptures : Julien Marolf © Patrick Tresch
Sculptures : Julien Marolf
© Patrick Tresch

Théâtre La Grange de Dorigny, Lausanne
7-11 février 1996

Texte : Roelof Overmeer, Adam Piette
Mise en scène : collective
Eclairage : Cedric Overmeer, Patrick Tresch
Musique : Gaspard Bucher, Philippe Nihan
Distribution : Tom Burke, Catherine Flütsch, Malina Guéorguiéva, Matthieu Leimgruber, Didier Maillat, Roelof Overmeer, Nathalie Perret-Gentil, Adam Piette, Carine Reymond, Caroline Saugy, Dorothea Schlimm, Nicole Schweizer

Nicole Schweizer © Catherine Flütsch
Nicole Schweizer
© Catherine Flütsch

Deserts met en scène cette nécessité de repartir à zéro, une nécessité à la limite du supportable mais incontournable, nécessité mortelle mais aussi comique, nécessité théâtrale, nécessité humaine. Faut-il pour cela désapprendre tout ce que l’on a déjà appris ? Si cela est possible dans l’imaginiaire, la réalité du corps s’y oppose, et cette dernière informe la réalité du théâtre. Repartir dans le désert, c’est ne plus partir ployant sous un “savoir”, mais ce n’est pas pour autant partir léger comme l’ignorance. L’étendue infinie du “Wasteland”, du pays désertique, nous oblige à tranformer notre savoir en questions qui peuvent mener à la vie, mais mèneront plus certainement à la mort.
Cette expérience de balbutiements de ceux qui croyaient avoir appris à parler, c’est l’expérience de l’exilé. C’est celle d’Oreste, d’Oedipe, de Médée, d’Othelllo, de Vladimir et d’Estragon. Faire du théâtre, c’est accepter de s’exiler, que ce soit de notre quotidien, de notre corps, de notre langage ou de notre raison, sans avoir désappris leur savoir, mais en l’ayant transformé en langage ouvert en questions. Pourquoi ? Parce que c’est seulement dans cette ouverture de langage que ce qui est autre (le ciel , les animaux, le minéral, la mort et ses spectres) peuvent entrer, parce que ce n’est qu’avec cette forme nouvelle de langage que nous pouvons devenir autre et que les spectateurs peuvent alors, en tant qu’autres, entrer dans le spectacle.
Roelof Overmeer

Dépaysement théâtral à Lausanne
La Sun and Moon Company nous invite à errer dans le désert et ses mirages.
La dernière création en anglais de la compagnie théâtrale amateur Sun and Moon, “Deserts”, arpente des espaces arides où, de loin en loin, ont lieu des rencontres improbables. Après un procès digne d’ “Alice au pays des merveilles”, l’Accusé est condamné à une traversée du désert.
Dans ces solitudes, une âme errante, un rat, une corbeau, un serpent et quelques pierres sont ses seuls et énigmatiques repères. Mis en demeure d’apprendre les règles d’un jeu aléatoire par ses interlocuteurs sibyllins, l’Accusé devient juge après avoir été partie au terme d’une initiation qui l’a renvoyé sèchement à lui-même.
Métaphore de l’expérience théâtrale, “Deserts” est aussi celle de la vie, où chacun, tour à tour, doit faire face au grand jury de son destin. La pièce porte un regard à la fois critique et complice sur le jeu social où, comme dans les cauchemars, les questions ont pour principal but d’ensabler les réponses.
Martine Hennard, Le Nouveau Quotidien, 9 février 1996