Civilités et sauvagerie

Par Amandine Rosset

Sauvage : Opéra de Chambre / de Dominique Lehmann (musique) et Pierre Louis Péclat (livret) / mise en scène Hélène Cattin / Théâtre de la Grange de Dorigny / du 8 au 10, puis du 15 au 17 janvier 2016 / plus d’infos

©Lauren Pasche
©Lauren Pasche

Comment réagir face à la sauvagerie ? Est-ce que tout le monde n’aurait pas une part sauvage au fond de lui-même ? Et finalement, qu’est-ce que la sauvagerie ? Voilà les questions que soulève l’opéra tragicomique repris par Hélène Cattin.

La metteure en scène Hélène Cattin s’est lancé le défi de diriger sa première pièce musicale. Pour ce faire, elle a décidé de reprendre la création tragicomique Sauvage, qui date de 2002, en mémoire de son compositeur romand Dominique Lehmann, mort en 2006. La scénographie de cet opéra de chambre est très simple et nous met dans l’ambiance d’une terrasse en plein été, notamment grâce au plancher surélevé et aux costumes estivaux des personnes présentes sur scène. L’espace est construit en deux parties : celle des comédiens-chanteurs et celle des musiciens situés dans un coin de la scène, qui interagissent tout au long de la pièce avec eux.

Au commencement, le public se retrouve face à une jeune fille prénommée Liaraca, interprétée par Diane Muller, qui sera la seule à parler sur scène puisque tous les autres personnages s’exprimeront en chantant. Sans comprendre exactement qui est cette femme mystérieuse, on perçoit la provocation et la forme de folie qu’elle répand autour d’elle. Ce personnage va servir d’élément déclencheur de la sauvagerie au cœur de la pièce.

Loin d’être toujours présente sur la scène, elle est cependant au centre du propos des quatre autres personnages présents justement pour parler d’elle. En effet, Marie, la femme qui a accueilli Liaraca chez elle, a demandé à des amis de venir la soutenir dans l’éducation et la civilisation de la jeune fille. C’est de cette confrontation entre le monde plein de civilités représenté par les chanteurs et l’animalité incarnée par Liaraca qu’émerge un questionnement sur la définition même de la sauvagerie, qui n’est peut-être pas exclusivement négative. Mais ce qui va véritablement lancer le débat seront les différentes réactions des chanteurs à l’arrivée de Liaraca. Chacun va vivre cette rencontre à sa manière et une question va alors prendre l’ascendant sur le reste : où se cache vraiment la sauvagerie ?

La musique est aussi au centre de la pièce. Elle aide à dissocier les différentes atmosphères ou les différents discours tenus sur scène. Elle fait monter la pression, particulièrement grâce aux percussions bien présentes. Elle amplifie véritablement toutes les actions et aide les spectateurs à mieux suivre l’histoire qui leur est présentée, car elle illustre des discours qui sont parfois un peu difficiles à comprendre, notamment lors de canons où chacun des personnages tient un propos différent. Si vous voulez découvrir ou redécouvrir la musique de Dominique Lehmann, rendez-vous donc à la Grange de Dorigny entre le 15 et le 17 janvier 2016.